« Il fut naturel pour nous de faire du dialogue et de la réflexion une question essentielle de notre méthodologie… Ce que nous avons appris nous apparaît maintenant comme une évidence : prendre soin des relations, des approches, autant et même plus que le but lui-même. Nous avons constaté que l’attitude correcte est celle de la prudence, de l’observation, de l’apprentissage des regards différents – ne les refusons pas, et mettons nous à réfléchir sur nos doutes » - Carlos Liberona
Il n’est pas aisé de faire un bilan de notre “Assemblée Régionale de Citoyen(ne)s du Cône Sud - que nous nommerons ici l’Assemblée, car il s’agit bel et bien d’une réalité complexe en mouvement.
Avec la perte physique de notre ami Carlos Liberona, qui fut notre principal moteur et coordinateur général, ce bilan est apparu d’autant plus nécessaire afin de réorganiser les efforts et de poursuivre l’initiative conformément aux objectifs fixés.
Qu’est-ce que l’Assemblée ? Qui la constitue ? Depuis quand existe-t-elle ?
L’assemblée est essentiellement une “démarche”, un processus, ou encore un mouvement, une dynamique qui évolue et qui croît.
Elle tient son origine de l’Assemblée mondiale de citoyens qui a invité plus de quatre cent représentants sociaux du monde entier et organisée en 2001 dans la ville de Lille en France. Elle s’est ensuite étendue à travers différentes expériences sur les cinq continents.
Dans le Cône Sud, à partir de l’année 2007, l’Assemblée a fusionné et s’est complétée du Réseau de Responsabilités Humaines. Elle est aujourd’hui constituée des composantes de ce réseau au Chili, au Pérou, en Bolivie et en Argentine. C’est cet ensemble qui compose le “Cône Sud”, auquel viennent s’ajouter de nombreuses organisations et des personnes liées à certaines initiatives et axes de travail.
Environ 300 organisations et personnes ont pris part jusqu’à maintenant au travail de l’Assemblée au sein des quatre pays.
Quel en est l’objectif ? De quoi s’agit-il ?
Il s’agit fondamentalement de répondre à une crise évidente de la gouvernance actuelle, c’est-à-dire à une crise du mode de régulation et d’organisation de la société, aussi bien au niveau local et national qu’au niveau régional et mondial. Cette crise est fondamentale. C’est une crise de civilisation. Elle est à l’origine de toutes les autres : celle de l’éthique, de l’économie, des forces armées, de la politique, de la culture, de l’environnement, de l’alimentation, de la santé... etc.
Notre postulat est que la nouvelle et nécessaire gouvernance mondiale doit être bâtie avec des acteurs régionaux, à partir de grands blocs de pays, regroupés autour de la gestion de leurs biens communs. Cela implique de former des citoyennes et des citoyens actifs, capables de participer au premier plan et de faire advenir la nouvelle gouvernance dans ces pays et blocs régionaux. Ces citoyens sont actifs, divers quant à leur identité, à leur appartenance professionnelle et thématique, et partagent des visions communes. Ce sont aussi des citoyens intégrés régionalement, en l’occurrence autour de la région sud-américaine, et dialoguent avec d’autres Assemblées citoyennes dans d’autres régions du monde. Tels sont nos objectifs.
Lorsqu’on la définit ainsi, l’Assemblée "n’invente rien". Elle constitue une réponse aux crises, aux nécessités et aux dynamiques de la réalité à la fois globale, régionale et locale. Elle manifeste un effort conscient et réfléchi des peuples et de la citoyenneté qui s’expriment, qui sont en recherche et qui se construisent. C’est l’idée juste au moment historique juste.
Qui sont exactement ces citoye(ne)s ?
“Nous tous ! La citoyenneté exige des conditions économiques, sociales et culturelles qui ont été souvent déniées et continuent de l’être à l’heure actuelle où les identités continuent d’être fondées sur la nationalité.
Les assemblées devraient donner naissance à une nouvelle vision de la citoyenneté : penser le futur en tant qu’acteur de plein droit, en tant qu’individu égal aux autres, avec le but d’engendrer un processus collectif. Qui seront donc ces citoyens ? Tous ceux susceptibles de se reconnaître dans ces valeurs et désirant s’engager sur cette voie…
…ces assemblées visent à permettre à l’ensemble des citoyens de pouvoir relever les défis de la société, sentir le droit et le devoir de la comprendre et de se prononcer à son égard”.
(Extrait de “Les Assemblées de citoyens”, document de travail pour la première rencontre de coordinateurs des Assemblées de citoyens des cinq continents. Paris, juin 2008, Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme – FPH).
Quels en sont les formes et les critères de fonctionnement ?
Nous ne sommes ni un parti politique, ni une organisation verticale. Nous sommes un réseau de réseaux, divers et complexe. Des personnes et des organisations partagent un fond commun d’évidences, ancré autour de la responsabilité, de la pluralité et de la solidarité. De là émergent d’autres valeurs : la justice sociale et environnementale, la non exclusion... etc.
Voilà pourquoi nous ne pouvons fonctionner que sur la base d’une éthique de l’ouverture et de l’articulation des différences au sein de nos valeurs. Nul ne peut être le maître exclusif de la parole et de la vérité. Nous ne craignons pas la différence, bien au contraire. Nous la mettons en valeur. Nous assumons la polémique et le conflit, mais sur la base du respect, de l’argumentation sérieuse et fraternelle en nous efforçant d’atteindre des accords collectifs.
Même si l’Assemblée est dotée d’une structure définie au sein de laquelle s’organisent des responsabilités de fonctionnement, la participation au niveau des idées et des activités demeure horizontale et réciproque. Personne n’est par définition supérieur ou dispose de davantage d’autorité. Le consensus et les décisions relèvent de l’argumentation et de la pertinence des idées.
Il faut pour cela beaucoup d’engagement et de conscience de ces valeurs et de ces principes. Il faut également une vigilance mutuelle pour empêcher le potentiel de discussion de dériver vers une sorte de « solidité monolithique et chimérique » d’idées qui seraient vouées à l’échec. Nous faisons confiance à la diversité respectueuse, celle d’où naît la force de construire des actes authentiquement communs. Le dialogue et les réflexions collectives sont pour ainsi dire le coeur méthodologique de l’Assemblée et il est donc crucial d’y prêter une attention singulière.
Une Coordination générale est en place. Elle est composée par Ula, Alihuen et Ricardo, auxquels s’ajoutent un/e représentant(e) de la Coordination de chacun des autres pays : Angela en Argentine, Rodrigo en Bolivie et Lucía au Pérou. Le but est de coordonner les multiples actions, de les faciliter et de les élargir, sans jamais les exclure a priori.
Notre forum virtuel info@foros.asamblea-conosur.net constitue un espace par excellence où sont diffusés une multiplicité d’actions, de réflexions, d’accords et de désaccords, sur lesquelles toutes et tous discutent de façon horizontale, réciproque et respectueuse.
Comment est-elle reliée à l’échelle mondiale ?
Un mécanisme de coordination à l’extérieur du Cône Sud est établi avec les processus des Assemblées dans le monde entier. Elle est sous la responsabilité de Gustavo.
C’est par cette voie que nous sommes reliés aux processus d’Assemblées de Citoyens des autres continents préparant eux aussi des rencontres régionales en 2010. En Asie se préparent le Forum Inde-Chine-Japon et la grande Assemblée de Citoyens à Bengalore pour le mois d’août 2010. En Océanie, l’Assemblée aura lieu dans une des îles du Pacifique. Dans la région Sahélo-saharienne, on travaille déjà sur la troisième étape des caravanes itinérantes comme un instrument constructif et citoyen visant à dépasser la montée de la violence. En Méditerranée, le travail et la discussion s’établissent entre les “deux rives”, sud européenne et nord africaine.
Ce sont ces mécanismes à travers lesquels le local se relie au régional et au mondial. Nous mettons ainsi sur pied, de façon concrète, ce solide réseau citoyen au niveau mondial, profondément enraciné et nourri des réalités particulières, et étroitement lié au niveau mondial. C’est la seule manière d’être à la hauteur des enjeux de la construction de nouvelles citoyennetés et de nouvelles géométries du pouvoir mondial.
Notre site web des Assemblées et les “Cahiers de route”, soutenus et élaborés par une équipe coordonnée par François, nous tiennent au courant et “traduisent”, dans tous les sens du terme, ces expériences, ce vécu et ces réflexions. Elles alimentent réciproquement l’ensemble des participants dans un mouvement pluriel et solidaire annonçant lui-même la nouvelle architecture de la Gouvernance que nous cherchons à construire.
Les rencontres générales des Assemblées et les participations de certains représentants venant des autres processus complètent à la fois les échanges personnels et collectifs d’expériences, le vécu commun et les réflexions.
Comment est-elle financée ?
L’Assemblée bénéficie d’une prise en charge minimale de la Fondation Charles Léopold pour le Progrès de l’Homme - FPH pour soutenir les communications, les coordinations et l’appui des activités. La FPH a son siège en Suisse et en France. Le financement n’est pas intégral, il contribue à ce que chaque organisation ou groupe puisse compléter cet appui autant que possible par le biais de partenariats avec d’autres institutions susceptibles de prendre en charge une partie des activités envisagés.
Quel en a été le développement jusqu’à présent ?
Nous avons défini notre “Première Assemblée de Citoyen(ne)s du Cône Sud” à la fois comme le point de commencement d’un processus et comme l’achèvement d’une première étape. L’Assemblée aura lieu à Iquique au Chili, en novembre 2010. C’est dans cette perspective que nous menons des activités depuis 2007.
Les activités menées depuis lors ont été nombreuses car des centaines d’organisations et de personnes se sont d’une manière ou d’une autre associées à l’Assemblée. Il serait trop long de citer en détail toutes les initiatives auxquelles nous participons et qui alimentent la démarche de l’Assemblée (initiatives bilatérales, multilatérales, échanges, partenariats, ...etc).
Nous mentionnons cependant les activités qui suivent, directement liées à notre effort d’organisation et à la mobilisation de nos partenaires :
I. Rencontres interrégionales
- a) Jeunes : Valparaíso : janvier 2007
- b) Solution maritime bolivienne : Antofagasta, avril 2007
- c) Éducation et jeunes : Córdoba : janvier 2008
- d) Mouvement de Femmes : Lima, avril 2008
- e) Dépasser le Ressentiment : pour une nouvelle Gouvernance du Cône Sud, en partenariat avec le Forum pour une nouvelle Gouvernance Mondiale : décembre 2008, Iquique, Chili
- f) Rencontre de mouvements écologistes populaires : janvier 2009, Santiago, Chili
- g) Deuxième Rencontre de Militaires démocratiques de l’Amérique latine : Octobre 2008. Santiago, Chili
- h) Séminaires Internationaux et autres activités des Chaires ci-dessous.
II. Écoles itinérantes
- a) Méthodologies citoyennes : Lima, avril 2008 et Cochabamba, avril 2008
- b) Communication populaire alternative : Cochabamba, 2009
III. Chaires : Alliance d’Universités et d’Acteurs sociaux
- a) Droits de l’homme à l’Université De Los Lagos Chili, en 2008
- b) Peuples indigènes à l’Université Arcis Chili, en 2008
- c) Intégration régionale Sud-américaine “Francisco Miranda” à l’Université Arcis Chili, en 2007
et des éditions à l’U. San Marcos, Lima Pérou, en 2008 et 2009 ;
Formation au diplôme à l’U. San Simón Cochabamba Bolivie en 2009 ;
et Séminaires Internationaux sur Eau et géopolitique à Córdoba Argentine, en 2008 et 2009
- d) Centre d’Études Stratégiques – CEDES et Université Arcis. 2009, Chili
IV. Publications
- a) Revue de réflexion théorique “Pensamiento Propio - RPP”, 4 numéros par an, 2008. Parution du numéro trois. Blog : revistapensamientopropio.blogspot.com
- b) Premier Cahiers : Fiches de réflexion et discussion, 2008,
- c) Publication Chaire Intégration Sud-américaine : “Memoria y destino” (“Mémoire et destin”) 2008, Chili.
- d) Publication Chaire Intégration Sud-américaine : “Yataris de la integración” (Magiciens de l’intégration), Pérou : 2009
- e) Journal “Qhapaq Ñan” ;
- f) Série d’articles au Monde Diplomatique du Chili (liens : http://www.lemondediplomatique.cl/A..., http://www.lemondediplomatique.cl/H..., http://www.lemondediplomatique.cl/A...) ;
- g) Contenus de l’Assemblée sur le site web “Piensa Chile” : http://www.piensachile.com/content/...
- h) Contenus de l’Assemblée sur le site web de la charte de Responsabilités humaines : http://www.carta-responsabilidades-...,
- i) Une série de vidéos des activités sur : http://www.traversees.org/article.p..., https://www.dailymotion.com/videos/T..., http://www.cmmigrants.org/spip.php?...,
https://www.dailymotion.com/video/x9..., etc.
V. Communications
VI. Coordinations avec des Assemblées dans d’autres continents
A travers les échanges, les communications (site web et “Cahiers de route”) et visites permanentes, outre les rencontres autour des Assemblées, telles que la Rencontre de coordinateurs des Assemblées de Citoyens (Paris, Juin 2008) et des rencontres plus larges comme les forums et les sommets.
... nous continuons avec la mémoire de notre compagnon Carlos Liberona