Asambleas Ciudadanos


 

Documents

 


Retrouvez ici les différents documents apportant un éclairage approfondi sur les multiples aspects des assemblées de citoyens. Les documents sont disponibles en trois langues et organisés en fonction de trois thématiques :
1. Relations entre les assemblées et dialogue des facilitateurs,
2. Enjeux, méthodes et défis des assemblées de citoyens,
3. Histoire et construction sociale des assemblées.

 

 

Enjeux, méthodes et échelles des assemblées de Citoyens

Traductions : français . Español . English


Introduction de Pierre Calame lors de la première réunion des facilitateurs des assemblées citoyennes sur Paris en juin 2008. Il rappelle l’objet et les enjeux des assemblées de citoyens à partir de l’expérience de l’Alliance pour un monde responsable, pluriel et solidaire et une vision innovante de la gouvernance.


"C’est un plaisir et beaucoup d’émotion de retrouver autour de la table à la fois des anciens amis, avec lesquels on a déjà beaucoup cheminé, et des nouveaux visages qui ouvrent à de nouvelles aventures. L’idée d’Assemblées de Citoyens est le résultat d’une longue histoire, d’un long cheminement que je voudrais vous restituer brièvement.


1. L’idée d’Assemblées de Citoyens est née de l’Assemblée Mondiale de Citoyens de Lille


A l’issue de l’Assemblée Mondiale de Citoyens, qui s’est tenue à Lille en décembre 2001 et à laquelle un certain nombre d’entre vous avez participé, plusieurs suites majeures se sont dessinées qui, depuis, inspirent profondément l’action de notre fondation.


La première est ce que l’on a appelé l’agenda pour le 21e siècle, c’est-à-dire ce que nous avons impérativement à faire ensemble pour arriver à une planète vivable, durable. Nous avons découvert lors de cette Assemblée que cet agenda était parfaitement clair et qu’il comportait trois volets : l’éthique (sur quelles valeurs nous mettre d’accord pour pouvoir gérer ensemble notre unique planète) ; l’évolution vers une société soutenable (alors que nos modèles de développement actuels ne le sont pas) ; et enfin un nouvel art de gérer les sociétés, d’une nouvelle gouvernance, dans une étape nouvelle de l’humanité où les problèmes sont infiniment plus liés entre eux qu’ils ne l’étaient et où on ne peut pas séparer les problèmes locaux autrefois des problèmes globaux (tout ce que nous vivons au quotidien lie de manière intime ce qui se passe au niveau local et ce qui se passe au niveau global). Nous avons conclu que notre devoir en tant que fondation était de contribuer du mieux que nous pourrions à la mise en oeuvre de cet agenda.


Le deuxième résultat majeur de l’Assemblée Mondiale de Citoyens a été l’adoption de la Charte des responsabilités humaines, c’est-à-dire l’affirmation que nous pouvions nous mettre d’accord sur une éthique commune. Cette éthique commune est le reflet même de nos interdépendances. Elle repose sur la reconnaissance que chaque chose que nous faisons a un impact sur nos voisins, proches ou lointains, et que nous devons être capables d’assumer éthiquement cet impact.


La troisième suite était de dire : un jour il faudra qu’il y ait non seulement une Assemblée Mondiale de Citoyens mais aussi des Assemblées Locales, des Assemblées Nationales, des Assemblées Régionales de Citoyens.


2. D’où viennent l’idée et les principes méthodologiques des Assemblées ?


Comment cette idée s’est-elle imposée à nous comme une priorité ? Pour le comprendre il faut revenir un peu en arrière dans l’histoire, à la naissance de l’Alliance pour un monde responsable et solidaire et aux réflexions qui ont animé le groupe de Vézelay, qui était à l’origine de cette Alliance, à la fin des années 80 et au début des années 90.


Nous avions compris dès cette époque que nous aurions à faire face à des mutations profondément nouvelles pour l’humanité. Nous avions compris aussi que ces mutations étaient d’ampleur planétaire. Mais, une fois cela dit, nous étions en face d’un certain nombre de défis.


Le premier est que, si les interdépendances sont à l’échelle planétaire, il n’existe pas de communauté politique à la même échelle. D’où la question nouvelle : comment construit-on une communauté, en particulier une communauté mondiale, lorsqu’il n’y a pas de communauté politique ?


Comment à partir de nos différences arriver à l’idée d’un vivre ensemble, à l’aptitude à gérer ce vivre ensemble ? On gère d’habitude des Etats ou des villes, des communautés déjà instituées avec des membres, avec des habitants, avec des citoyens. Mais comment institue-t-on une communauté ? Comment la fait-on naître ? C’était le premier défi majeur.


Mais, deuxième défi majeur, était l’interdépendance ne gomme pas la diversité. Il est impossible de construire un « vivre ensemble », à quelle qu’échelle que ce soit, si ce vivre ensemble ne reconnait pas en même temps qu’il bénéficie de la richesse de la diversité, s’il ne la respecte pas. Dès lors notre défi méthodologique était de construire l’unité à partir de la diversité.


Une fois ceci posé de quelle diversité s’agissait-il ? Pouvait-on réduire la diversité à une dimension qui serait la dimension de l’appartenance sociale ou la dimension de l’appartenance à un pays ou à un territoire ? La réponse était évidemment non. D’autant plus que nous avions également compris que nous ne saurions pas construire une société vivable sans relier beaucoup de questions ensemble : il n’y a pas de lieu sur lequel on peut agir de manière à faire changer le monde. Nous avions conscience que les choses étaient liées entre elles.


De ce fait, nous en sommes venus à définir la diversité selon trois dimensions : premièrement la diversité géographique ; deuxièmement la diversité sociale et professionnelle ; troisièmement la diversité des sujets à traiter, la diversité thématique. Toute la construction de l’Alliance, au fil des années 90, s’est organisée autour de l’idée qu’il fallait gérer simultanément ces trois diversités, qu’il fallait construire le dialogue entre nous au sein de chacun de ces ordres de diversité. D’où l’idée de groupes géoculturels (diversité géographique), l’idée de collèges (diversité socioprofessionnelle), de chantiers thématiques et qu’il fallait progressivement, par la confrontation des conclusions tirées de ces trois processus, construire des perspectives communes. L’idée même d’Assemblée de Citoyens a eu d’entrée de jeu une importante dimension méthodologique.


3. L’enjeu des processus instituants


On comprend bien la nécessité d’instituer une communauté au niveau mondial. Mais pourquoi ne pas s’en tenir à ce niveau mondial ? Pourquoi s’intéresser aussi à une Assemblée comme l’Assemblée Malienne de Citoyens, là où l’on pouvait considérer qu’il existait déjà des communautés instituées et donc que l’enjeu instituant avait disparu.


La réflexion que nous avons menée nous a convaincus que même dans les communautés apparemment instituées, disposant d’institutions, des parlements, des gouvernements, des administrations, l’existence de ces outils de gestion de la société ne garantissaient en rien la pérennité du sentiment d’appartenance à la communauté.


J’en suis venu à dire dans mes propres réflexions sur la gouvernance, qu’il est indispensable qu’une société se réinstitue, qu’une société réinvente son projet commun. Nous avons pensé que ce cheminement par le biais des trois diversités géographique, socioprofessionnelle et thématique était un cheminement intéressant à suivre pour construire les nouvelles perspectives de la société.


4. Les Assemblées de Citoyens, élément de réponse à la crise de la démocratie


A ceci s’est ajoutée une troisième réflexion, qui a trait à la crise de la démocratie. Les démocraties représentatives classiques sont en crise, à l’échelle des pays mêmes. C’est vrai en Afrique et c’est l’objet de l’Alliance pour refonder la gouvernance en Afrique. C’est vrai, plus encore, à une échelle comme l’Union Européenne où les institutions, les règles -comme les règles de libre concurrence par exemple- ont précédé la construction d’un sentiment de citoyenneté.


C’est la raison pour laquelle nous en sommes venus à penser qu’une des urgences de la démocratie était de se refonder pour passer d’une démocratie formelle, caractérisée par des institutions, des élections, à une démocratie substantielle où l’ensemble des citoyens peut se saisir des défis de la société, se sent en droit et en devoir de les comprendre et de se prononcer à leur sujet.


5. Les Assemblées de Citoyens, espace nouveau de dialogue entre les sociétés


Forum Chine – Inde, Assemblée Méditerranéenne de Citoyens, l’Assemblée de Citoyens du Cono Sud, l’Assemblée du Maghreb, partent de l’idée que le découpage des communautés humaines par des frontières nationales ou régionales reflète de moins en moins la nature des interdépendances du monde. Au-delà des frontières, les relations entre sociétés restent gérées par des ministères des affaires étrangères -des relations diplomatiques- ou par des relations entre entreprises- des relations commerciales.


Ce n’est pas suffisant. Les citoyens n’y trouvent plus leur compte. Comme on l’a expérimenté en ce début d’année, à l’occasion des événements du Tibet et du parcours de la flamme olympique les relations entre la Chine et l’Europe sont apparemment très bonnes sur le plan diplomatique et commercial mais se creusent en réalité des fossés d’incompréhension qui se révèlent et vont devenir source de conflits à l’occasion d’événements en apparence secondaire.


Si nous voulons construire une paix durable dans le monde, il n’est pas d’autre solution que de permettre aux citoyens eux-mêmes de se parler de coeur à coeur et de face à face de ce qui sont maintenant fondamentalement nos problèmes domestiques, c’est-à-dire des problèmes de la planète.


Comme vous le voyez, l’idée d’Assemblée de Citoyens est née de la convergence de préoccupations différentes mais complémentaires : revitaliser la démocratie, gérer les rapports entre unité et diversité, aider des communautés à s’instituer, dépasser les formes traditionnelles de relations entre les sociétés".



 

 

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